Le métier de prête-plume.

 

La grande force de l'écrivain fantôme
Consiste à demeurer en retrait.
Il saura se fondre dans l'atome.
Sans perdre de vue votre intérêt.

       

Qu'est-ce qu'un prête-plume?

Voici la définition usuelle: "Personne chargée d'écrire anonymement une œuvre littéraire (ouvrage), artistique ou un discours qu'un tiers signe et s'attribue contre rémunération". Je précise que les livres dont il est question ici via cette définition concernent en particulier les romans et les biographies autrement dit l’histoire d’une vie moulée dans un récit qui peut se décliner en styles variés tels le journal (intime ou extime), le portrait (forme courte, centrée, vue sous un angle précis), les mémoires (récit d’évènements historiques par ceux qui font l’histoire), le témoignage (récit d’une brève période de vie parsemée d’expériences ayant profondément changé une existence).

Plusieurs termes désignent ce métier. Autrefois, on parlait de "nègre littéraire". Cependant cette appellation à connotation raciale sonnant de façon injurieuse aux oreilles délicates du public a été bannie le jeudi 16 novembre 2017 par le ministère de la culture suite à une plainte du Conseil représentatif des associations noires de France. L’ancienne formule fut donc remplacée par "Prête-plume". Ces professionnels de l'écrit existent également sous la qualification "d'écrivain public". Dans le jargon littéraire, il est fréquent d’utiliser l'expression "écrivain fantôme" (le fameux Ghost-Writer des pays anglo-saxons) pour les désigner. Je fais la distinction entre écrivain public et fantôme et me permets une interprétation personnelle. A mes yeux, le premier baignerait plutôt dans l’aide à la personne. Imaginons une assistante sociale dotée d’une formation d’écrivain public. Elle agirait au grand jour, ses compétences engloberaient la rédaction de formulaires administratifs, notes de synthèse, rapports, lettres de motivation, courriers de réclamation tandis que le deuxième tendrait plus vers un travail rédactionnel de longue haleine enveloppé d'une notion de confidence qui exige le maintien d'une posture délicate et feutrée un peu comme une identité cachée. L’idée m’inspire. Prenons l’exemple d’un écrivain alias Fantômette dont l’exécution du travail au service d’une famille aisée resterait invisible aux yeux du commun des mortels puisqu’il agit à la dérobée, dissimulé sous le sceau du secret professionnel. Le fils bien rêve d’écrire un roman mais n’en a pas la trempe. Ses parents louent les talents de Fantômette :      

-En quoi puis-je vous être utile monsieur?
-Charles se rêve désormais écrivain célèbre mais à mon humble avis, il est loin d'avoir le potentiel créatif requis et la persévérance nécessaire à n’importe quel réussite. Vous savez il a été élevé dans l’idée que la vie demande peu d’efforts lorsqu’on a de l’argent. C’est de notre faute. Il a besoin d’un petit coup de pouce, vous me comprenez ?
-Vous souhaiteriez peut-être que je l’aide à s’organiser dans son travail, mettre en application les méthodes qui ont fait leur preuve dans la construction d’une intrigue, la création de personnages ?
-Pas exactement, je vous saurais gré de prendre en charge l’entièreté de cette mission qui à n’en pas douter évoluera en véritable chef-d’œuvre. Bien entendu, nous garderons l’accord secret et notre rétribution sera plus que généreuse.    

                                             

Permettez-moi une petite parenthèse métaphorique. L’écrivain public dans un langage pittoresque correspondrait à une pleine lune illuminant la nuit, sa lumière vive éclairerait le client désorienté voire ignorant grâce à ses connaissances, lui apporterait une aide précieuse dans les tâches administratives de la vie quotidienne.

En revanche, écrivain fantôme et prête-plume paraissent résonner de la même façon. Si je devais chercher la petite bête, jouer sur les nuances, juste en m'attachant aux mots, le prête-plume pourrait suggérer un croissant de lune légèrement visible. Un homme politique louerait ses services de biographe. Engagé pour écrire les discours, les mémoires, on dirait de lui « tiens il est présent, connu et reconnu tout en discrétion et en retenue » or l'écrivain fantôme mystérieux évoluerait masqué. Fantômette me laisse songer à la nouvelle lune, une lune noire, aussi invisible qu’insaisissable. Pourtant les trois cycles lunaires viennent de la même entité. Mais reçoivent un éclairage différent. Dans un autre registre, plus terrestre, nous pourrions associer au Ghost Writer un aspect « souterrain », des galeries creusées au plus profond d’une terre meuble où il se faufilerait incognito. Un monde caché, ténu, parallèle.

Alors, prête-plume, écrivain public ou Ghost Writer ? Quel que soit le nom qu’on lui donne, cette plume connait le poids des mots :

J'aime les mots poids-plume.
Laisser leur énergie m'envelopper.
Sentir des ailes me pousser,


Me dresser, m'élancer, m’élever …
… Prendre beaucoup d’altitude
  … Toucher la pleine Lune
     … Atteindre la planète Neptune

Quelle voluptueuse envolée :
Légère ; Moelleuse ; Cadencée ;
Elle me pénètre, la totale plénitude
Soudain s'abat sur moi une enclume.
Surchargée, écrasée, lourdée,

La chute est rude.

 

Continuons notre exploration du métier de prête-plume. Pour savoir quelles qualités indispensables cet écrivain doit posséder, cliquez ici